La France vient d'être rétrogradée à la 44ème place mondiale des pays au titre de la liberté de la presse. La raison principale de cette perte de rang ? "La majorité présidentielle a eu des mots très menaçants, parfois insultants, envers certains médias", selon Reporters Sans Frontières . Plus globalement, c'est "l'immixtion importante du pouvoir dans l'activité des médias" qui est également sanctionnée.
Ah. J'ai dû mal lire la presse, justement. Je pensais que le responsable de tous les maux des journalistes était Jean-Luc Mélenchon… On va se livrer à un petit jeu. Je vais écrire une citation à propos des journalistes, vous allez essayer de deviner si c'est Jean-Luc Mélenchon qui insulte un journaliste ou si c'est Nicolas Sarkozy qui respecte la liberté de la presse. C'est parti : "Les journalistes, ce sont des nullards, il faut leur cracher à la gueule, il faut leur marcher dessus, les écraser. Ce sont des bandits. Et encore, les bandits eux, ont une morale". Bien vu, c'est Nicolas Sarkozy, le 18 mars 2009, lors d'une réunion devant les dirigeants de la majorité.
Ainsi donc le grand pourfendeur de cette corporation est le Président de la République. Ce n'est pourtant pas lui que l'on accuse sans cesse de populisme, que l'on compare à Jean-Marie Le Pen. Ce n'est pas à lui que les journalistes s'adressent avec une déférence coupable. Alors pourquoi ? C'est ça la vraie question qu'il faut se poser. Le petit monde médiatique n'échappe pas aux règles qui régissent la plupart des groupes professionnels : il y a en son sein une frontière de classe qui induit la façon de voir l'actualité. Le stagiaire précaire payé à la pige n'aura pas le même regard que le présentateur vedette payé 400.000€ par an. Et c'est ce dernier qui a l'antenne, celui-là qu'on entend.
Or, Nicolas Sarkozy défend les riches. Inutile ici de rappeler l'ensemble des mesures prises dans ce sens par le gouvernement depuis mai 2007. Jean-Luc Mélenchon prétend, au contraire, prendre aux riches, parmi lesquels figurent l'immense majorité des stars médiatiques de l'actualité. Inutile d'aller chercher ailleurs des raisons. Elles sont là. La levée de boucliers quant à la réaction de Jean-Luc Mélenchon à propos de l'interview de David Pujadas à Xavier Thomas, syndicaliste licencié de chez "Conti", est disproportionnée par rapport au réel traitement que subit la presse dans son ensemble par le pouvoir : menaces, vol d'ordinateurs de journalistes enquêtant sur l'affaire Woerth/Bettencourt, nominations arbitraires, licenciements sur la radio publique de chroniqueurs trop critiques contre la droite, etc.
Pas de faux-semblants, pas d'hypocrisie : ces journalistes-là sont eux-aussi concernés par le "qu'ils s'en aillent tous". Nous avons le courage de le dire. Sans doute alors nous pourrons l'an prochain dépasser le pays qui nous précède au classement.
Au fait, c'est la Papouasie Nouvelle Guinée qui est 43ème.
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